Petit traité de manipulation par Beauvois et Joule

30 juillet 2017

Extrait

Extrait de l’introduction

Pas facile de se garer au centre-ville un samedi après-midi. Par bonheur, juste devant vous, une place se libère à l’angle de l’avenue Victor-Hugo et du boulevard Georges-Brassens. Vous saisissez l’aubaine. Malheureusement, devant le parcmètre, vous vous rendez compte qu’il vous manque 50 centimes. Que faire ? Le plus simple est sans doute d’arrêter le premier passant et de lui demander poliment cette somme. Mais vous risquez d’être déçu. Alors, suivez ce conseil : commencez par demander l’heure et, l’heure obtenue, avant que la personne ait tourné les talons, dites-lui que vous avez besoin de 50 centimes pour alimenter le parcmètre. Nous pouvons vous assurer qu’en procédant ainsi vous multiplierez vos chances de succès ! Mais vous n’êtes pas obligé de nous croire sur paroles.
Un chercheur américain (Harris, 1972) a précisément comparé l’efficacité de ces deux façons de procéder pour obtenir un dime (environ 50 centimes d’euro aujourd’hui) dans les quartiers d’Albuquerque, la plus grande ville du Nouveau Mexique. Lorsque la requête était formulée directement, un citadin sur dix seulement acceptait de donner la somme demandée ; il s’en trouvait quatre fois plus lorsque l’expérimentateur avait préalablement demandé l’heure.
Les chercheurs qui réalisent de telles expériences (il s’agit de psychologues sociaux) n’ont généralement pas besoin de monnaie. Ils ont même l’habitude de restituer aux promeneurs l’argent qu’ils leur ont ainsi subtilisé pour les besoins de la science. Ils réalisent évidemment ces expériences pour éprouver la validité de considérations théoriques qui peuvent être assez savantes. Il reste qu’ils fournissent, ce faisant, une façon de procéder – une technique – que vous pouvez utiliser tous les jours pour obtenir d’autrui quelque chose que vous n’auriez pas obtenu par des moyens plus directs, en tout cas pas avec la même facilité. Or, obtenir de quelqu’un qu’il fasse librement quelque chose (ici : donner 50 centimes) dont il aurait préféré se dispenser, et qu’il n’aurait pas fait à la suite d’une simple demande, à appeler les choses par leur nom, c’est de la manipulation. N’est-ce pas, par exemple, une forme de manipulation que d’obtenir de Madame O. qu’elle commande un tourne-page, trois porte-bouchons, et une douzaine de cendriers gonflables, autant d’achats qu’elle n’aurait jamais sérieusement envisagés avant d’avoir rempli le bulletin de participation au super grand prix d’automne de La Maison dolmatienne qui permet de gagner cette année un chèque de 500000 euros, une KW 13 dernier modèle, et une semaine de vacances en famille sur les plages dolmates ?
On rencontre ainsi, dans cette discipline expérimentale et descriptive qu’est la psychologie sociale, un nombre non négligeable de travaux dans lesquels les chercheurs amènent des femmes, des hommes ou des enfants à se comporter en toute liberté’ différemment de la façon dont ils se seraient comportés spontanément, à l’aide de techniques qu’on peut considérer comme de véritables techniques de manipulation. La recherche d’Harris qui vient d’être évoquée n’est qu’un exemple parmi d’autres. Ces travaux scientifiques sont riches d’enseignements pratiques car ils touchent directement à notre vie quotidienne. Il n’est guère, en effet, que deux façons efficaces d’obtenir de quelqu’un qu’il fasse ce qu’on voudrait le voir faire : l’exercice du pouvoir (ou des rapports de force) et la manipulation.

Revue de presse

« Comment amène-t-on autrui à faire ce qu’on voudrait le voir faire ? La solution se trouve dans cette introduction aux techniques de la manipulation. » –Le Monde

« Et le plus fort, c’est que ça marche aussi en amour. Essayez, vous verrez… » –L Écho des savanes

« Finalement, le titre est on ne peut plus exact. La manipulation est observée sous tous ses angles scientifiques, puis disséquée dans toutes ses utilisations pratiques… » –Challenges

Présentation de l’éditeur

Avec cette nouvelle version, les auteurs ont souhaité actualiser et surtout enrichir leur best-seller d’un chapitre supplémentaire. Cette version comprend dix chapitres. Les neuf premiers nous éclairent sur les techniques de manipulation qui peuvent être et qui sont quotidiennement utilisées en face à face (entre deux personnes, le manipulateur et le manipulé), pour le meilleur comme pour le pire. Le dixième chapitre, totalement inédit, nous éclaire sur les techniques de manipulation de masse, utilisées par les professionnels du marketing pour modeler, à notre insu, nos idées, nos goûts et nos façons de consommer.
Déjà vendu en France en 350 000 exemplaires et traduit dans une douzaine de langue.

Un mot de l’auteur

Le succès de cet ouvrage nous a conduit à l’actualiser sur le plan bibliographique et sur le plan des témoignages vécus dont certains commençaient à dater.
Nous avons également ajouté un nouveau chapitre sur l’ «inconscient cognitif» permettant de passer des procédures d’influence interindividuelle à l’influence de masse.
Nous en avons, bien sûr, profité pour retravailler l’écriture afin de rendre l’ouvrage plus clair – et surtout plus agréable à lire- espérant ainsi toucher un public encore plus large.Robert-Vincent Joule et Jean-Léon Beauvois

Biographie de l’auteur

Robert-Vincent Joule et Jean-Léon Beauvois figurent parmi les chercheurs francophones en psychologie sociale les plus connus. Le premier est professeur à l’université d’Aix-Marseille, le second à l’université de Nice Sophia Antipolis. Outre le Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens, ils ont rédigé ensemble trois ouvrages : Soumission et idéologies (1981), La soumission librement consentie (1998) aux Presses universitaires de France et A radical dissonance theory (1996) chez Taylor et Francis.
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